Un monde sans travail
Par Daniel Susskind
Flammarion, 2023, 432 p.
L’ouvrage a été écrit avant que le ChatGPT ne fasse irruption dans l’actualité. Il n’en reste pas moins à lire, car celle-ci ne fait que conforter la thèse de son auteur, un économiste anglais, ancien conseiller au 10 downstreet, pour qui il y a de quoi s’inquiéter face aux nouvelles capacités de l’IA. Non qu’elle soit devenue l’égal de l’homme – elle repose sur des puissances de calcul et non des facultés cognitives. Mais elle parvient d’automatiser de plus en plus de tâches non routinières dont on pensait seuls les humains capables (traduire, diagnostiquer des maladies, etc.). De toute évidence, il y aura encore moins de travail pour tout le monde y compris les cols blancs et autres intellectuels. Le chômage technologique dont parlait Keynes et qu’on pouvait juguler grâce aux gains de productivité et à l’augmentation du gâteau (le PNB), tend à devenir structurel. Si l’auteur reste flou sur le moment du basculement dans un monde sans travail, en revanche, il voit très bien la solution pour limiter les dégâts : l’affirmation d’un Big State qui sache tenir tête aux Big Tech (Google et autres) pour assurer une meilleure redistribution des richesses, partager le capital, aider les travailleurs encore en activité dans la défense de leurs droits et les sans emploi à occuper leur temps libre.
Sylvain Allemand